La théorie économique récente s'attache à analyser plus précisément l'hétérogénéité des préférences et la genèse des goûts. En effet, il a souvent été reproché aux économistes d'avoir une vue étroite sur les facteurs déterminant les choix des individus (rationalité de l'homo oeconomicus), et notamment, de ne pas suffisamment s'intéresser à leurs dimensions subjectives. Et empiriquement, il est illusoire de vouloir expliquer la distribution de certaines variables (patrimoine, revenu, consommation,...) sans prendre en compte cette hétérogénéité. - Pour expliquer les comportements humains, la microéconomie du consommateur, outre la distribution des revenus et la structure des prix, prend pourtant en compte le système des préférences et des croyances des individus. Mais il est vrai que les tests empiriques de ces prédictions théoriques ne contrôlent pas l'hétérogénéité des préférences et des croyances individuelles. C'est d'abord sur ces dimensions subjectives des comportements, notamment sur leurs mesures empiriques, que portera principalement notre projet. - Mais comment la théorie économique explique-t-elle cette hétérogénéité des préférences individuelles ? En fait, derrière le voile de l'ignorance, elle suppose ex-ante l'homogénéité des agents : au départ, tous les individus sont identiques (modèle d'Harsanyi). Les différences de goût ne seront alors dues qu'à des différences de parcours et d'environnement. Notre étude s'applique ainsi à étudier ces facteurs individuels qui vont révéler les préférences. - Les questions d'actualité sur le devenir des systèmes collectifs d'assurance sociale concernant la redistribution, le financement des systèmes de retraites, de santé et de chômage, seront au centre de notre étude. - Les liens entre les politiques publiques dans ces domaines et les comportements individuels ne sont pas univoques. D'un côté, les politiques influencent les comportements des individus (offre de travail, épargne pour la retraite, précaution contre le risque de chômage, financement des coûts de la dépendance...) et par là même les inégalités (distribution de revenu, de consommation ou de patrimoine). Inversement, les individus, par leur vote ou par leurs opinions, peuvent agir, en amont, sur ces politiques sociales. - Les données ou enquêtes disponibles ne permettent pas d'avoir accès à ces indicateurs de préférences et d'opinion simultanément aux autres informations socio-économiques. Même s'il existe des données sur les sphères financière et professionnelle des individus, il est essentiel de disposer d'une enquête qui les combine avec des données sur leurs goûts, leur histoire, leur situation dans d'autres domaines (santé, famille, logement, éducation, etc.) et leurs anticipations. La plupart des questions seront donc originales mais pour des raisons de comparaisons internationales, nous reprendrons également certaines formulations d'autres enquêtes, européennes et américaines. - Ce projet propose donc la construction d'une enquête centrée sur la mesure empirique de ces facteurs individuels subjectifs susceptibles d'améliorer notre connaissance des comportements humains (en matière d'épargne et de patrimoine, de santé, de retraite, de chômage, de solidarité, d'inégalités). Ce faisant, on contribuera aussi au débat scientifique commun aux sciences sociales et cognitives sur l'importance des facteurs psychologiques dans la théorie de la décision. -